On a rarement vécu une période aussi intense sur le secteur digital depuis le COVID. On constate que la crise a poussé de nombreux acteurs à réfléchir à leur stratégie et à activer des projets digitaux dans l’objectif de développer leur activité ou d’assurer une continuité de service en cas de fermeture “physique”.

Chez Limpide on commence à avoir à notre actif un nombre suffisant de sites web internationaux pour partager notre retour d’expérience et vous donner quelques conseils pour bien appréhender les enjeux de ce type de projet.

SOMMAIRE

Un site web international ? Mais je pensais qu’ils l’étaient tous ?!

Commençons par définir ce qu’est un site web international ! A part si vous ciblez la Chine ou la Russie où les moteurs de recherche sont différents, les sites web sont accessibles dans le monde entier. Mais finalement ils ne sont pas tous conçus pour être performants dans tous les pays. Nous allons donc définir un site web international comme un site web qui a pour vocation d’être accessible à des cibles présentes sur différentes zones géographiques dans le monde.

Et grâce à cette définition, on comprend facilement que le site web se doit d’être multilingue.

Alors on ne s’inquiète pas généralement lorsque l’on parle de multilingue, c’est un élément totalement maîtrisé sur les sites internet, il existe un nombre important de Plugin sur le CMS WordPress qui vous permettront de gérer des contenus en différentes langues sur votre site. Il suffit ensuite de faire traduire vos contenus et de les intégrer dans la version dédiée.

Maintenant si le sens de lecture change ou l’alphabet n’est plus le même, comme pour l’arabe ou le japonais, c’est une autre histoire. Mais nous ne nous attarderons pas sur ce point lors de cet article, car en toute transparence, ce ne sont pas des problématiques que nous avons eu à traiter chez Limpide.

Les 3 types de sites web internationaux

Si on doit segmenter les types de sites web internationaux que nous avons pu réaliser on peut citer :

  • Un site global qui présente le même contenu en plusieurs langues
  • Un template de site qui est dupliqué autant de fois que l’on souhaite couvrir de pays et donc un contenu spécifique sur chaque pays
  • Un site global qui présente une partie de contenu commun et une autre partie personnalisée par pays

Pour avoir une vision claire des avantages de ces différents scenarios, nous allons interviewer Nicolas Tournois, co-fondateur et COO Limpide, qui va nous apporter son retour d’expérience.

Rencontre avec Nicolas Tournois, co-fondateur et COO Limpide

 

Bonjour Nicolas, merci de te prêter au jeu de l’interview. Peux-tu nous exposer ce qui est essentiel, selon toi, lorsque l’on veut entreprendre la création d’un site web international ?

Avec plaisir, c’est un sujet passionnant et on peut donner quelques conseils pour vous éviter de perdre du temps ou de créer un site qui ne répondra pas à vos objectifs.

Pour commencer je dirais qu’il y a trois piliers principaux qu’il faut avoir en tête :

  • La stratégie de développement business
  • L’organisation
  • La stratégie de marque

Les trois sont très liés et vont avoir des conséquences sur votre projet. Si vous sous-estimez leur inter-dépendance, vous aurez forcément des problèmes de planning ou d’adhésion des équipes lors de la refonte.

 

Finalement on pense aborder un projet opérationnel en refondant un site web mais tu parles de stratégie et d’organisation ?

C’est effectivement le premier enseignement que l’on peut tirer de l’ensemble des projets que l’on a mené. On propose systématiquement à nos clients une phase clé, le starter kit, un enchaînement d’audits, benchmarks et ateliers collaboratifs qui ont pour objectif d’aligner la vision stratégique de la refonte d’un site web. Lors de ces ateliers on se doit d’aborder la stratégie business, les offres, les cibles, l’organisation par pays…tous ces éléments sont à la base de votre développement et doivent être consolidés par l’ensemble des parties prenantes du projet. C’est assez évident quand on y pense, on peut vendre différemment d’un pays à l’autre, il faut donc prendre en compte les spécificités locales, ou pas…

 

Ou pas ? c’est-à-dire ?

C’est un peu moins évident mais un site web ne peut pas tout vendre à tout le monde. Si on veut être accessible et performant il faut parfois faire des choix et prioriser ses offres, ses cibles et/ou les pays. Ces choix sont plus faciles à comprendre quand on a participé à la réflexion. Par exemple, si je démarre une activité très opérationnelle dans un pays et que je dois déjà concentrer 100% de mon équipe sur des problématiques opérationnelles, je ne vais pas aller chercher à court terme à m’impliquer dans le dispositif digital de mon groupe. Et parfois c’est le cas inverse, je suis chargé de développer une activité sur une nouvelle zone géographique et je vais avoir besoin de “capter des leads” sans forcément pouvoir recruter une équipe de commerciaux, le webmarketing et les leviers digitaux seront donc les piliers de mon développement.

 

Ok on comprend mieux les impacts que peuvent avoir les spécificités de chaque organisation. Tu parlais tout à l’heure de stratégie business, peux-tu nous en dire plus ?

La réponse de Nicolas mérite que nous sortions du format interview classique pour être plus clair :

La stratégie business

Elle est à prendre en compte dès le début de votre réflexion !

On peut rencontrer des situations très différentes en fonction des sociétés avec lesquelles nous travaillons.

Cas 1 : Je suis présent dans un seul pays mais je vends partout :

 

Par exemple, certaines sociétés sont présentes dans un seul pays et fournissent un service à l’international, c’est le cas de nombreuses start-up qui proposent des solutions SAAS, surtout dans leurs premières années d’existence. Ces sociétés ont une méthode de vente et un contenu qui ne varient pas (voire très peu) en fonction des pays. Ils proposent souvent un site web unique qui est traduit en plusieurs langues.

Leur stratégie de développement commercial est plutôt orientée sur des dispositifs webmarketing locaux qui alimentent un site web central.

Une fois la cible sur le site, les parcours utilisateurs se mettent en place et on vise la conversion. Dans ce type de cas, on peut se dire que la centralisation de l’organisation est un acquis et que pour le site web ce sera la même chose. On retrouve une équipe centrale, proche de la direction, qui prendra en charge la création du site web et décidera rapidement et facilement.

Dans les points positifs on peut noter :

  • un planning projet court
  • une facilité dans la prise de décision
  • une expérience utilisateur homogène
  • une maintenance “unique”
  • le coût du projet
  • une administration du site web par une seule équipe
  • un seul déploiement

Pour les points négatifs :

  • une performance locale très inégale en fonction de nombreux paramètres
  • l’impossibilité de proposer des offres ou des contenus locaux

Cas 2 : Je suis présent dans tous les pays dans lesquels je vends

 

D’autres sociétés se développent avec une présence dans plusieurs pays. Cela implique naturellement une gestion décentralisée du business avec des directions pays qui ont une connaissance très précise de leur marché, de leurs cibles et qui développent souvent des offres adaptées.

Dans ce contexte, il est pertinent de recueillir les besoins de chaque pays (ou regroupement de pays pour simplifier l’approche) afin de s’assurer que le site propose une expérience en phase avec les attentes des équipes et des marchés. C’est une étape qui va forcément prendre du temps pour poser une vision qui alignera tout le monde.

Ensuite on peut créer un “master template”, une base de site internet qui aura pour vocation de répondre à “tous les besoins”. Ce template sera rempli de contenus spécifiques à chaque pays et ce sont généralement des équipes locales qui s’en chargent. On est là sur une centralisation de la création mais sur une adaptation locale. C’est un dispositif qui vise les organisations qui ont une autonomie certaine et une maturité assez forte sur toutes les zones géographiques.

Cette solution présente de nombreux avantages :

  • une personnalisation locale presque idéale
  • une performance élevée
  • l’autonomie des équipes locales
  • une approche SEO performante

Dans les désavantages on peut citer :

  • une certaine complexité à concevoir le master template qui s’adaptera localement
  • un planning naturellement plus long, de part la phase amont de recueil de besoins
  • l’organisation de la production de contenu par pays pour assurer une mise en ligne “ontime”
  • l’autonomie des équipes locales
  • une maintenance non mutualisée
  • autant de déploiement que de pays couverts

Cas 3 : Je suis présent dans plusieurs pays mais ils ne sont pas tous au même niveau de développement et d’autonomie

 

On a aussi rencontré des cas hybrides, des sociétés qui souhaitent laisser de l’autonomie à certains pays mais pas à tous. Comme on l’a vu précédemment, l’autonomie peut aussi représenter une charge qui vient déséquilibrer l’organisation locale. On peut être sur la voie de l’autonomie mais ne pas encore avoir assez de compétences pour réellement l’être.

Pour répondre à cette problématique, certaines sociétés préfèrent garder la main sur certains sites et vont donner progressivement de l’autonomie aux autres. On peut dire que c’est une organisation à géométrie variable qui prend en compte la charge et la compétence, généralement des programmes de formation complètent cette organisation pour viser une autonomie « maîtrisée ».

Ce dispositif nécessite techniquement d’intégrer le “broadcast” dans la diffusion des flux. Mais qu’est ce que ça veut dire cette phrase ? On peut tout simplement dire qu’une partie du contenu sera gérée en “central” et on pourra choisir de la diffuser sur certains sites et pas sur d’autres. Cela permet de remplir les sites des pays qui n’ont ni le temps, ni les compétences de le faire, et de laisser de l’autonomie à ceux qui souhaitent avoir des contenus spécifiques.

Cette solution présente de nombreux avantages :

  • une expérience utilisateur homogène
  • une personnalisation locale possible
  • une maintenance mutualisée
  • une performance plus forte localement
  • l’autonomie des équipes locales

Dans les moins on peut citer :

  • une certaine complexité à mettre en place le dispositif qui permettra de sélectionner les contenus et offres spécifiques en fonction du pays (broadcast ou pas)
  • un planning naturellement plus long, de part la phase de recueil de besoins
  • l’organisation de la production de contenu par pays pour assurer une mise en ligne “ontime”
  • l’autonomie des équipes locales

Vous aurez remarqué que l’autonomie des équipes locales est citée dans les avantages et dans les inconvénients…On ne s’est pas trompés, c’est tout simplement que l’autonomie c’est bien lorsque les équipes sont compétentes et qu’elles ont du temps disponible mais si ce n’est pas le cas, cela donnera un site web mal rempli et une expérience utilisateur qui ne pourra pas être performante…ce point nous amène naturellement à parler d’organisation et de compétences des équipes.

Replongeons dans notre interview !

Tu parles de contenu, on entend beaucoup parler de SEO, c’est bien ça le sujet ?

Alors oui et non.

Le contenu c’est effectivement du texte optimisé SEO mais pas que, on peut aussi parler de visuels qui sont importants dans l’expérience que vous souhaitez proposer à votre cible. En fonction des pays, les visuels sont importants car ils permettent à la cible de s’identifier.

Les contenus ce sont également des offres, des produits, des annonces d’emploi etc.

Mais c’est sûr que la stratégie SEO que vous allez mettre en place aura une importance capitale dans la performance de votre ou de vos sites web.

Pour tous ces types de contenus vous pouvez très bien avoir un catalogue central d’offres et appeler des segments choisis sur le site d’un pays en particulier.

Justement au niveau des offres, comment ça se passe dans le cas où un CRM est installé ?

Le CRM, véritable coeur du dispositif digital

 

Le catalogue des produits / offres devient de plus en plus central chez les clients avec qui nous collaborons et nous connectons 90% des sites web que nous créons aux CRM de nos clients. On travaille sur salesforcehubspotsage mais aussi des moins connus comme KobanOdooSugar CRMEudonet

C’est assez fréquent finalement, surtout lorsque l’on couvre plusieurs pays et que l’on vend sur le web. Par exemple, si un produit apparaît à différents prix en fonction des pays, un prospect peut être tenté d’aller contacter le pays le “moins cher” afin de bénéficier de cet avantage. On part donc souvent sur une gestion centralisée de la politique tarifaire et sur un ciblage IP par pays pour orienter les cibles vers le bon site. Cela permet de faire évoluer en temps réel les caractéristiques techniques et les prix associés aux produits.

On travaille par exemple avec un acteur de la formation qui intervient en Asie, aux USA et en Europe. La gestion de son catalogue d’offres est centrale dans sa stratégie et ils ont depuis longtemps intégré un CRM dans leur dispositif. Cet outil est lui-même connecté au site internet, à un LMS (Learning Management System) et à leur système d’informations, ce qui permet d’avoir une automatisation d’un parcours de bout en bout, de l’acquisition jusqu’à la réalisation de la formation.

Cette gestion centralisée des offres peut également intégrer une segmentation des offres pertinentes par pays. On peut vendre certaines choses dans une zone géographique et pas dans une autre, auquel cas vous aurez un dilemme à résoudre, est-ce que l’on affiche l’offre, quitte à la faire gérer par un autre pays si un prospect se présente, ou est-ce qu’on ne l’affiche pas, au risque de perdre un prospect…Et oui là encore il faudra faire des choix.

 

On voit que la stratégie business est centrale dans la réflexion à mener sur son dispositif digital et on comprend bien les impacts organisationnels. Tu as également mentionné la stratégie de marque, peux-tu nous en dire plus ?

A ce niveau c’est plus global que le seul site web.

Généralement on entreprend une refonte de site web lorsque l’on atteint une nouvelle étape de son développement.

Et une nouvelle étape donne forcément des envies de modifier son positionnement et/ou son image. On peut citer deux cas majeurs : le rebranding ou la modernisation de la marque.

Le rebranding de la marque avant la refonte du site

Par exemple, dans le cas d’une société qui a fait une croissance externe, elle va chercher à harmoniser et à rassembler en créant une marque unique, cela permet d’inculquer une culture d’entreprise commune et cela passe par un branding commun.

A ce stade, c’est la stratégie globale qui domine. C’est assez simple mais finalement on oublie souvent la base de la stratégie.

Lors d’une refonte, toutes les filiales ou business unit souhaitent être représentées, on doit donc prévoir une harmonisation de l’image et du discours. Etre conscient de l’impact que peut avoir cette évolution de la marque est primordial car la refonte du site aura un effet révélateur des divergences si ce travail n’est pas fait au préalable.

Il faut donc préparer les choses en amont pour que le planning de la refonte n’en pâtisse pas.

L’image de marque de votre société dépend de plus de parties que les contributeurs au projet du site internet. On peut citer le comité exécutif par exemple, qui participe rarement au niveau opérationnel du site, mais qui sera déterminant dans les choix stratégiques au niveau de l’image de marque.

On ne propose pas un nouveau logo ou une nouvelle charte graphique uniquement aux équipes opérationnelles mais on identifie en amont qui sont les décideurs sur cette partie et on travaille dans un premier temps en direct avec eux pour démarrer le projet web dans un contexte sain et clair pour tout le monde. Sur ce point, on a déjà perdu beaucoup de temps sur certains projets car cela n’avait pas été anticipé.

Mais toutes les marques ne se réinventent pas à chaque refonte tout de même ?

Non bien sûr, mais on ne vit pas des temps forts tous les ans, on a le droit de profiter de la refonte de son site pour travailler son image et affirmer son positionnement. On ne va pas dire que c’est systématique mais c’est tout de même assez fréquent que nos clients souhaitent faire évoluer leur image au moment de la refonte.

Utiliser le temps fort de la refonte pour moderniser son image

 

Si tu devais donner 3 conseils pour la refonte d’un site web ayant une portée internationale ?

  • Poser vous la question de votre branding : si vous ressentez le besoin de le faire évoluer, faites en un “before” de votre projet de refonte, c’est nécessaire pour ensuite être efficace.
  • Analyser votre stratégie de développement business car elle déterminera votre organisation projet, ce qui aura un impact fort sur le planning de réalisation de votre site web.
  • Cartographier les forces et les faiblesses des pays pour leur proposer un dispositif qui leur apporte une réelle valeur ajoutée. Pour vous faciliter la tâche, posez vous les questions suivantes :
  1. Est-ce que les pays ont les compétences nécessaires à l’administration du site ?
  2. Peuvent-ils gérer l’animation webmarketing ?
  3. Disposent-ils du temps nécessaire pour réaliser ces actions ?

Merci Nicolas pour avoir répondu à nos questions. Le mot de la fin ?

Un projet de site Internet international c’est avant tout une aventure humaine, la rencontre de personnalités et de cultures différentes, et c’est toujours passionnant.